|

Mieux comprendre votre cerveau pour gagner en intelligence émotionnelle.

Parmi les nombreuses évolutions, voire révolutions, que connaît le monde du travail depuis presque un quart de siècle, il en est une qui n’a pas pu vous échapper, c’est l’intérêt porté par les recruteurs et les managers aux « soft-skills » et plus particulièrement à l’intelligence émotionnelle. Ces compétences « transverses » ou « comportementales » définissent ce qui est de l’ordre du savoir-être d’un individu aux côtés de ses compétences techniques, son savoir-faire.

Difficile d’établir une liste exhaustive de ce que sont ces « compétences douces » tant le terme recouvre une diversité de notions : il peut s’agir de comportements, d’aptitudes, des traits de personnalité. Parmi elles on retrouve régulièrement : la capacité d’analyse, la communication, la créativité, la capacité à convaincre, à négocier, la confiance en soi, la gestion du stress ou encore… l’intelligence émotionnelle. C’est sur cette dernière que nous allons nous pencher aujourd’hui.

L’intelligence émotionnelle est un vrai sujet d’intérêt pour les entreprises, nous le voyons bien parmi nos clients chez Cinaps : la demande est forte de développer les compétences émotionnelles dans leurs équipes. Cela fait sens, le monde est incertain, inquiétant, les changements permanents. Les entreprises font face à de gros risques : Burn out, Big quit (grande démission), Quiet quitting (démission silencieuse)… Derrière ces anglicismes barbares, une réalité : les gens « craquent ».  Il est donc attendu des collaborateurs de pouvoir traverser cela en préservant une forme de stabilité émotionnelle au service à la fois de leur propre bien-être (limiter leur stress) et de la qualité de leurs relations au travail (équipe soudée, confiance mutuelle, coopération).

Au programme de cet article :

1- La mise en lumière des compétences émotionnelles.
2- Des compétences émotionnelles plein la tête.
3- Quel est votre profil émotionnel ? Les 6 dimensions de votre intelligence émotionnelle.
4- Améliorez votre intelligence émotionnelle.

1- La mise en lumière des compétences émotionnelles

C’est Daniel Goleman, journaliste américain, qui a mis un coup de projecteur sur les compétences émotionnelles au milieu des années 90 grâce à son livre « L’intelligence émotionnelle », best-seller mondial traduit dans près de 40 langues.


Deux raisons principales à ce succès :

  • La première c’est que, selon Goleman, le succès professionnel dépendrait au moins autant des compétences intellectuelles (le QI d’une personne) que des compétences émotionnelles.
  • La seconde c’est que contrairement au QI qui est une caractéristique invariable, figée, le QE (quotient émotionnel) lui, peut être amélioré, augmenté si on s’en donne les moyens, si on « travaille sur soi ».

Il n’en fallut pas plus pour assurer le succès du livre de Goleman ! Car en résumé ce qu’il nous explique c’est que la réussite et la richesse sont à la portée de tous (même si on n’est pas un génie) tant que l’on travaille au développement de nos compétences émotionnelles.

Le message est simple, optimiste et a donc suscité un fort engouement du public ce qui a entraîné dans la foulée un déferlement de parutions sur la gestion des émotions et une course à la recette miracle en 5, 10 ou 15 étapes pour développer ses compétences émotionnelles.

Je ne sais pas pour vous, mais moi, dans tout ça je m’y perds un peu parfois. C’est comme ça qu’on se retrouve à errer au rayon « Développement personnel » à la Fnac sans trop savoir à quel Saint Coach se vouer. Enfin… c’était comme ça, jusqu’à ce que je croise, virtuellement, la route de Richard Davidson.

Si vous m’avez déjà lue sur ce blog (avez-lu mon article « Comment une réalité mathématique nous aide à comprendre l’intelligence collective ? ») vous savez que j’aime bien quand la science rencontre la psychologie. Ça me rassure, ça m’évite de me perdre et de me retrouver à lire « 10 clés pour booster votre carrière grâce aux pommes de terre ».

2- Des compétences émotionnelles plein la tête

Richard Davidson est donc professeur en psychologie à l’Université du Wisconsin et chercheur en neurosciences. Il a d’ailleurs collaboré avec Daniel Goleman pour étudier les effets de la méditation sur le fonctionnement cérébral (j’y reviendrai).

Plus de 30 ans de recherches poussées, soutenues par le progrès des techniques d’imagerie cérébrale ont permis à Davidson de révéler ce qui se passe concrètement dans notre cerveau lorsque nous vivons des expériences impactantes émotionnellement (qui nous effraient, nous mettent en joie ou en colère, etc…). Mais loin de simplement décrire des circuits cérébraux universels pour chaque émotion, ce que ses recherches ont révélées c’est que nous avons chacun une façon unique, personnelle de réagir aux émotions qui nous traversent. C’est ce que Davidson appelle le Profil Emotionnel et il est observable par IRM.

D’après ses travaux, ce profil (ou style) émotionnel se décline en 6 dimensions qui correspondent chacune à un circuit neuronal spécifique que je ne décrierai pas ici. Si cela vous intéresse, je vous invite à lire cet article de la revue Cerveau&Psycho: N0 111 – Juin 2019 qui détaille les parties du cerveau en jeu pour chacune des dimensions du style émotionnel.

3- Quel est votre profil émotionnel ? Découvrez les 6 dimensions de votre intelligence émotionnelle

La résilience

C’est votre capacité à vous remettre plus ou moins rapidement d’une émotion négative. Qu’il s’agisse d’une petite contrariété (une dispute avec votre conjoint au sujet de la vaisselle) ou d’un grand drame (la perte d’un être cher), chacun d’entre nous est plus ou moins résilient face à l’adversité. Si vous avez tendance à ressasser pendant des heures voire des jours la moindre petite contrariété, vous êtes plutôt « lent à récupérer » dans le cas contraire, vous êtes « rapide à récupérer ».

La perspective

C’est votre propension à voir les choses sous un angle positif ou négatif. Le verre à moitié vide, ou le verre à moitié plein. C’est aussi la capacité à faire perdurer les émotions positives. Par exemple, si vous rencontrez un ami de longue date sur le chemin du travail et que le sentiment de joie d’avoir pu le croiser perdure toute la journée quand vous y repensez, on peut dire que vous êtes quelqu’un de plutôt « positif ». A contrario vous êtes plutôt « négatif » si vous avez tendance à focaliser sur les défauts, les mauvais côtés et voir vos émotions positives vite disparaître.

L’intuition sociale

Cette compétence émotionnelle correspond à votre capacité à capter les signaux non verbaux chez les autres. Avez-vous déjà assisté à ce type de scène ? Un homme et une femme discutent, elle a les bras croisés, recule un peu, détourne le regard… et lui ne se doute pas du tout qu’il ne lui plait pas. Cet homme doit être « socialement perplexe », il ne capte pas les signaux non verbaux envoyés par la femme. Par contre, si vous captez tout de suite lorsqu’un de vos collègues est préoccupé (épaules baissées, regard vague, air absent), vous êtes ce que Davidson appelle « socialement intuitif » : vous possédez cette compétence émotionnelle de lire les émotions de l’autre.

La conscience de soi

C’est votre capacité à ressentir les émotions, les sentiments, dans votre corps. On peut être « opaque à soi-même » ou « conscient de soi-même ». Les gens opaques à eux-mêmes sont comme « coupés » de leurs émotions, ils ne savent pas vraiment exprimer pourquoi ils sont en colère, ou tristes, l’introspection est pour eux une notion assez obscure. Les gens conscients, ressentent physiquement leurs émotions, ce qui se passe dans leur corps. Selon Goleman, percevoir ses propres émotions est la base de l’intelligence émotionnelle : grâce aux travaux de Davidson, on comprend pourquoi développer cette compétence est plus ou moins facile pour certaines personnes.

dimension de l'intelligence émotionnelle, la sensibilité au contexte

La sensibilité au contexte

Il s’agit de la compétence émotionnelle qui consiste à adapter son comportement au contexte. A se comporter avec justesse. Par exemple : baisser le ton de sa voix au restaurant, ne pas parler avec son voisin au cinéma ou au théâtre, ne pas pianoter sur son téléphone pendant une cérémonie de mariage, tout cela témoigne d’une personne plutôt « connectée » au contexte. En revanche, si vous avez tendance à « gaffer » en public, si votre entourage doit parfois vous « recadrer », alors vous êtes plutôt « déconnecté ».

L’attention

La capacité à rester concentré, à ne pas se laisser perturber par des stimuli chargés émotionnellement. Il peut sembler étrange que cette compétence émotionnelle fasse partie du modèle de Davidson car la capacité à se concentrer est généralement associée au fonctionnement cognitif plus qu’émotionnel du cerveau. Ce qu’explique Davidson, c’est que notre tendance à nous « déconcentrer » est d’autant plus forte quand il s’agit de signaux émotionnels. Par exemple, vous êtes dans un open space, vous entendez votre collègue quelques bureaux plus loin hausser le ton au téléphone : si cela perturbe immédiatement votre travail et que vous n’arrivez plus à vous concentrer, on peut dire que vous êtes plutôt « non concentré » par contre, si vous arrivez à travailler chez vous avec BFM en fond sonore et les enfants qui jouent dans la pièce d’à côté, vous êtes plutôt « concentré ».

*Lire aussi : « Le contrôle de l’attention, la super carte soft skills du manager. »

Vous connaissez maintenant les 6 axes du style émotionnel. Chaque personne a un profil émotionnel unique : sur chacun de ces axes, vous pouvez être à l’une ou l’autre extrémité ou quelque part entre les deux.

Par exemple, vous pouvez être « plutôt rapide à récupérer » (résilient), « très positif » (perspective) mais « socialement un peu perplexe » (intuition sociale) et « assez opaque à vous-même » (conscience de soi).  En vous situant personnellement sur ces 6 axes, vous pouvez appréhender quelles dimensions de votre intelligence émotionnelle investir comme une force et lesquelles travailler pour vous améliorer.

4- Améliorez votre intelligence émotionnelle

Il est important de rappeler qu’il n’existe pas de « bon » ou de « mauvais » profil. Bien sûr certains aspects sont plus facilitants dans la vie de tous les jours, l’objectif c’est de prendre conscience de votre propre fonctionnement et de voir si vous vivez bien avec ou s’il est source de souffrances et de difficultés pour vous. Il y a des bons et des mauvais côtés à chaque aspect.

Par exemple quelqu’un d’excessivement positif ne mesure pas les risques, manque parfois de réalisme et a besoin qu’on lui remette les pieds sur terre.

Quelqu’un de trop « conscient de lui-même » interprétera le moindre changement dans son rythme cardiaque comme un signe de danger imminent et pourra développer des angoisses dans certains contextes.

Développer ses compétences émotionnelles ne consiste donc pas à devenir un être « hyper-sensible » mais à développer une forme de stabilité et de maîtrise de ses émotions. En vous comprenant en profondeur et avec lucidité, vous pourrez exprimer de façon apaisée vos besoins aux autres et ainsi construire des relations harmonieuses.

Si ce sujet vous intéresse, consultez notre offre d’accompagnement sur la communication positive :

Formation cinaps sur la communication positive

Comme je le disais précédemment, à chacune de ces 6 dimensions correspond un circuit cérébral spécifique qui a été révélé par imagerie cérébrale. Et ça, c’est une excellente nouvelle. Pourquoi ? Parce qu’il a été démontré que le cerveau est adaptable, malléable et ce tout au long de la vie. On parle de « plasticité cérébrale » : toute votre vie, vous pouvez entraîner votre cerveau par la répétition de schéma de pensée, de modes de fonctionnement, et ainsi développer vos compétences émotionnelles. Par exemple, si votre circuit de la résilience est un peu faiblard, vous pouvez travailler à créer de nouvelles connections neuronale sur ce circuit et devenir peu à peu plus résilient. Vous pouvez aussi vous entraîner à être plus attentif, plus conscient de vous-même, plus connecté au contexte… etc.

C’est comme cela, que vous pouvez développer votre intelligence émotionnelle : en cherchant à devenir plus sensible aux signaux non verbaux des autres, en ressentant mieux et en analysant les émotions à l’intérieur de vous, en étant capable de maîtriser vos émotions négatives.

L’intelligence émotionnelle c’est avant tout un entraînement cérébral. Alors comme si vous vouliez apprendre le piano ou le dessin, il va falloir répéter, être motivé, s’accrocher. Mais c’est à la portée de tous.

Comme je l’évoquais plus haut, Davidson et Goleman ont collaboré ensemble, notamment en travaillant sur les impacts de la pratique méditative sur le fonctionnement du cerveau. Pour Davidson (lui-même méditant assidu), la pratique de la méditation est une sérieuse piste pour la reprogrammation du cerveau et la création de nouvelles connections neuronales. Se concentrer 2 minutes par jour (puis 5, 10, 15 minutes) sur sa respiration pour améliorer son attention, penser avec gratitude à 5 choses positives qui nous sont arrivées dans la journée pour améliorer sa perspective. Voici là quelques pistes à explorer pour entraîner votre cerveau et peut-être devenir comme le promet Goleman… riche et célèbre grâce à l’intelligence émotionnelle !

Pour rester informé-e sur nos thématiques managériales,
abonnez-vous à notre newsletter

découvrir Cinaps
communication newsletter