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Reconnaissance au travail : pourquoi vos équipes vous ghostent (et comment les récupérer) ?

Il n’y a qu’à lire la BD de Fix « Les extraordinaires aventures de la vie de bureau – Chief Bullshit Officer » pour comprendre que la reconnaissance au travail est loin d’être un long fleuve tranquille. Or nous avons tous besoin de reconnaissance et les signes de reconnaissance influencent notre motivation au travail.  

Une récente étude d’OpinionWay et United Heroes** sur l’engagement (**réalisée en 2024 sur un échantillon de 5 478 salariés en France et à l’étranger) montre que depuis peu, les conditions de travail et les liens humains sont devenus tout aussi importants que la rémunération. Et quand on parle de liens humains et de management, la reconnaissance au travail arrive en tête (65 % des collaborateurs interrogés souhaitent de la reconnaissance). 

Il y a donc des attentes.

Mais alors, comment s’y prendre pour reconsidérer le développement d’une culture de la reconnaissance au travail favorisant l’épanouissement et la performance des collaborateurs ? Pourquoi avons-nous tant de mal à exprimer de la reconnaissance, et que faut-il reconnaître au juste ? Concrètement, quand on est manager, comment la pratiquer ? Régulièrement, ponctuellement ? De manière informelle ou pas, en individuel ou en collectif ? Bref, je vous invite à prendre quelques minutes de votre temps pour faire le tour de la question. Il est temps de repartir sur de bonnes bases pour cette rentrée.

 

Clara excelle pendant six mois dans son rôle de manager « intérimaire », gérant équipe et projets avec brio, recevant même les félicitations des clients. Mais au retour de congé maternité de sa responsable, aucun débriefing, aucun remerciement pour son investissement exceptionnel : elle redevient une simple assistante du jour au lendemain, comme si rien ne s’était passé. 

Cette absence totale de reconnaissance de ses compétences et de son engagement crée une frustration profonde. Clara, qui s’était révélée dans ce nouveau rôle, se sent invisible et dévalorisée. En quelques semaines, son enthousiasme se transforme en désengagement : elle fait le minimum syndical, arrive en retard et commence activement à chercher ailleurs. L’entreprise perd ainsi une collaboratrice talentueuse par simple négligence managériale. 

Ce qui aurait pu être fait, signes d’une reconnaissance efficace : 

  • Un entretien de débriefing avec sa responsable pour valoriser ses résultats concrets (projets menés, retours clients positifs, gestion d’équipe réussie) et un remerciement officiel devant l’équipe. 
  • Ou encore, l’engagement formel sur un plan de développement avec une promotion à court terme (6-12 mois) et la possibilité de continuer à porter certains projets qu’elle avait initiés. 

1. Le méchant raccourci : Reconnaissance = Reconnaissance des résultats 

Le psychologue et co-fondateur d’Empreinte Humaine, Christophe Nguyen, aborde l’objet même de la reconnaissance, souvent limitée aux seuls résultats des collaborateurs : « Quand on parle de reconnaissance, on voit souvent la partie émergée de l’iceberg, qui est la reconnaissance des résultats : vous avez délivré à temps, vous avez fait le boulot à temps […] Il faut élargir, je pense, cela. Les personnes attendent finalement autre chose de leur travail, de leurs relations qu’uniquement des bravos, des mercis. Elles sont en attente d’une reconnaissance existentielle comme celle de leur savoir-être, de leur énergie, de leur convivialité… et pas qu’une reconnaissance des résultatsEt puis, entre la personne et le travail qu’elle délivre, il se passe des choses. Elle travaille, elle a des pratiques et il faut reconnaître la qualité de ce qu’elle fait. C’est aussi la reconnaissance de l’investissement et de l’effort », suggère-t-il. 

Nous verrons un peu plus bas que la reconnaissance au travail se manifeste autant par les attitudes et les actes que par les paroles. Elle peut s’exprimer à travers la qualité relationnelle, la valorisation de compétences, d’un investissement, etc. 

2. L’éducation

L’éducation peut freiner la reconnaissance au travail de plusieurs façons : les héritages familiaux du « c’est normal de bien faire son travail », par exemple, créent des managers réticents à féliciter. La peur de « gâter » les collaborateurs, issue d’une éducation rigide, empêche de voir les bénéfices motivationnels. L’inconfort avec l’expression de ressentis positifs chez certaines personnes peut rendre difficile l’expression authentique de gratitude. 

3. Le manque d’écoute, de présence sur le terrain, de disponibilité. 

4. Le manque de recul sur le pilotage de l’activité. 

5. Le manque de reconnaissance au travail de la part de sa propre hiérarchie. 

Bien que la reconnaissance puisse se développer à travers les managers intermédiaires, les équipes ou des initiatives décentralisées, l’implication des dirigeants facilite une culture de la reconnaissance. 

6. Le grand écart entre une motivation et une implication dans le travail très fortes et en retour très peu de rétribution. 

7. Le changement permanent et banalisé, nécessitant le renouvellement des pratiques et le développement d’une ingéniosité pour faire face à l’aléa. 

Là encore, le surplus d’efforts peut aussi engendrer une frustration si ce n’est pas reconnu. 

8. La faible visibilité du travail accompli ainsi que la réduction des espaces collectifs d’élaboration et de co-construction, producteurs de reconnaissance symbolique. 

Quand on parle de reconnaissance au travail, cela peut se manifester à plusieurs niveaux

Cette forme de reconnaissance s’exprime par la qualité relationnelle et elle devrait être à la base de toutes les autres formes de reconnaissance. 
Par exemple : 

  • S’intéresser à son collaborateur dans sa globalité. 
  • Mettre en valeur les qualités humaines (qualité d’écoute, esprit conciliant, entraide…). 

Elle porte sur la manière d’exécuter le travail, incluant les compétences et qualités professionnelles de l’individu ou de l’équipe. 
Par exemple : 

  • Laisser de l’autonomie aux collaborateurs dans les domaines où leur niveau de compétence le permet ; tenir compte de leurs propositions, etc. 
  • Lors de l’entretien d’évaluation ou d’un débriefing, mettre en avant ce qui a été bien géré, même si le résultat n’est pas entièrement satisfaisant. 

Elle valorise les efforts consentis, quel que soit le résultat obtenu. 
Par exemple : 

  • Récompenser la disponibilité avec les moyens mis à disposition (réciprocité). 
  • Remercier/féliciter un collaborateur ou l’équipe pour l’implication dans un projet. 

Elle concerne l’atteinte d’un objectif, l’optimisation de l’organisation, le rendu d’un travail. 
Par exemple : 

  • Célébrer une réussite collective, permettre à l’auteur d’un succès de le présenter lui-même. 
  • Lors d’un débriefing, féliciter pour le résultat obtenu. 
idées pour exprimer de la reconnaissance au travail

Vous êtes dirigeant, manager et vous souhaitez favoriser le développement d’une culture de la reconnaissance dans votre entreprise ou au sein de votre équipe. Voici quelques idées pour améliorer vos pratiques : 

  • Reconnaissez les besoins de votre équipe en étant à l’écoute de façon active. Pour cela, soyez présent sur le terrain, au contact des collaborateurs et de l’activité en cours. 
  • Cultivez un regard positif sur l’équipe/le collaborateur et sur les situations. Même les conflits peuvent être utiles et faire progresser ; ils font partie de la vie d’équipe et du travail. 
  • Adaptez-vous aux situations et aux personnes, c’est une façon de reconnaître la singularité de chacun. 
  • Générez des feedbacks : échanges informels, temps de réunion, différents types d’entretiens (suivi d’activité, recadrage, valorisation annuelle…). Cette capacité à créer des espaces d’expression des ressentis, des besoins ou des idées, et faciliter le questionnement, le débat, les explications… est capitale car elle favorise la régulation et encourage le renouvellement des pratiques. 
  • Valorisez les compétences et proposez des entretiens réguliers : un excellent moyen de reconnaître les besoins et les difficultés et de faire progresser. 
  • Impliquez l’équipe : proposez de construire ensemble les règles du jeu communes, les valeurs, les pratiques. Cela participe à renforcer la cohérence identitaire de chacun dans le collectif. 
  • Pensez à la reconnaissance d’équipe : trop souvent la reconnaissance est présentée comme un sujet individuel. Or souvent, sans ses collègues, les échanges, le réseau, on ne fait pas grand-chose. 
  • Levez la tête du guidon : prenez un peu de recul et regardez en arrière pour mesurer le chemin parcouru. Cela permet de mettre en perspective les efforts déployés et ainsi de valoriser les progressions même quand la performance n’est pas au rendez-vous. 
  • Instaurez des rituels d’équipe : fêtez les succès, les bons résultats comme les événements marquants de la vie des collaborateurs (naissances, mariages…). Une manière de montrer que vous vous intéressez aux personnes en tant qu’êtres singuliers. Dans cette optique, la reconnaissance porte sur l’individu et non sur le salarié. 
  • Donnez à vos collaborateurs des occasions de grandir : formations, développement des apprentissages, mentoring, changement de poste, promotions… voilà de nombreuses occasions de favoriser la motivation. 

En synthèse, je dirais que la reconnaissance au travail ne peut se résumer à quelques félicitations ponctuelles ou à des gestes isolés, aussi sincères soient-ils. Pour être véritablement efficace, elle doit s’inscrire dans une démarche globale de l’équipe au sens large qui converge vers la valorisation des contributions individuelles et collectives.  

C’est pourquoi l’accompagnement des managers s’avère essentiel : transformer ses habitudes managériales, apprendre à donner des feedbacks constructifs (téléchargez notre Fiche Mémo « Observer ses feedbacks et les diversifier ») ou développer son écoute active nécessite un véritable apprentissage. Se faire accompagner par des professionnels permet d’acquérir ces nouvelles compétences de manière structurée et durable. 

Alors que les attentes des collaborateurs évoluent et que la guerre des talents s’intensifie, les entreprises qui sauront créer cette culture authentique de la reconnaissance prendront une longueur d’avance. Car au-delà de la performance, c’est bien l’épanouissement humain qui devient le véritable levier de succès des organisations de demain.  

Laetitia Tereygeol Cinaps

Laetitia Tereygeol – Directrice marketing et communication Cinaps

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